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7 avril 2008 1 07 /04 /avril /2008 09:23

LAÏCITE ET POLITIQUE
 

Avec

Patrick KESSEL, Co-fondateur du Comité Laïcité République, ancien Grand Maître du Grand Orient de France (GODF),

Alain BONDEELLE, Délégué du Groupe « Laïcité » à la Ligue des Droits de l’Homme et du citoyen (LDH), membre du Comité Central,

Jean-Paul DELAHAYE, Président du Cercle Condorcet d’Amiens,

Thierry VERSTRAETE, Responsable de Café Cité Amiens et du cercle PRS (Pour la République Sociale) Somme.

 

 

 

 

Ces quelques lignes ne prétendent pas résumer la totalité de cette conférence-débat animée par Vincent BAWEDIN, Président de la fédération LDH de la Somme, et qui a attiré une soixantaine de personnes à Camon, ce jeudi 3 avril 2008. Elles sont écrites simplement pour permettre de poursuivre un partage très riche entre militants et reconnu unanimement de grande qualité.

 
Libre à chacun de les compléter lors des prochaines rencontres…

Certains parmi nous se sont battus depuis des décennies pour cette laïcité qui remplit leur cœur. Nous avons pris conscience ce soir qu’elle est aussi le « le Cœur de la République »


La laïcité c’est le fondement absolu de la République


« Liberté, Egalité, Fraternité » Aux trois mots de la devise républicaine, nous aimons y ajouter celui de « Laïcité ». Les militants (et les organisations laïques)  reconnaissent tous l’importance primordiale de la laïcité au sein de la République mais ils ne sont pas toujours d’accord sur la manière de l’appréhender.

Cela n’effraie pas Patrick Kessel qui se  plaît à dire qu’il y a « plusieurs familles dans la maison du père ».

Ainsi il avoue être satisfait de la loi promulguée au temps de Jacques Chirac sur l’interdiction du foulard dans les écoles tandis qu’Alain Bondeele rappelle que la ligue défendit le principe du « ni loi, ni foulard »

L’histoire de la laïcité n’est pas un long fleuve tranquille…

Les enseignants et les parents d’élèves de la Somme se rappellent des luttes aux grands moments des votes des lois Debré et plus tard des lois Savary sous le premier septennat de François Mitterrand.

 

 

 

Les militants de la section LDH d’Amiens se souviennent des grandes discussions et des motions préparatoires au congrès national sur la laïcité organisé par la ligue des droits de l’homme à Limoges. Congrès qui mit en lumière les différentes appréciations dont parle aujourd’hui Patrick Kessel (photo ci-dessous).

 

 

Et Vincent Bawedin d’évoquer le regret qu’il avait eu de ne pouvoir réunir toutes les organisations se réclamant de la laïcité l’année du centenaire de la loi 1905.

 
On ne naît pas citoyen, on le devient

On naît catholique, on naît musulman, on ne naît pas citoyen.

C’est l’école qui forme le citoyen.

L’école de la république est donc d’une importance primordiale, car c’est cette école qui fera de chacun un individu responsable. Voilà pourquoi la défense de l’école républicaine est essentielle pour les défenseurs de la laïcité.


Un peu d’histoire

 

 

 La laïcité c’est notre histoire

« La laïcité c’est le cœur de la République » dit Jean-Paul Delahaye. Cependant le chemin est long pour la faire progresser, sans cesse remis en cause au cours de l’histoire.

Jean-Paul Delahaye rappelle la lente avancée de la suppression de l’enseignement religieux au sein de l’école républicaine :

En 1882, Jules ferry laïcise les programmes et invente l’instruction morale et civique à l’école primaire. Il libère le jeudi pour l’instruction religieuse.

En 1883, sous la pression et ne voulant pas heurter de front le parti adverse, Jules ferry ajoute « les devoirs envers Dieu » aux devoirs civiques et moraux.

En 1923, les devoirs envers Dieu sont supprimés dans les nouvelles instructions.

En 1940, Pétain remet les devoirs envers Dieu dans les écoles.

En 1945, De Gaulle les supprimera définitivement.

Les aumôneries des lycées ont d’abord été créées pour les pensionnaires qui ne pouvaient profiter du jeudi.

Il fut décidé également d’exclure tous les religieux de l’école publique. Le délai d’exclusion était de cinq  ans pour les hommes (le temps de former des enseignants) mais on ne parlait pas des femmes car les écoles normales pour les filles n’étaient qu’au nombre de trois …..Si bien qu’entre les deux guerres on vit encore des religieuses enseigner dans les écoles publiques !

 

La laïcité est une lutte permanente

Certains voudraient faire croire que la laïcité se résume à la tolérance. Il n’en n’est rien car elle est sans cesse remise en question par ses adversaires.

Jean-Paul Delahaye rappelle l’équilibre de 80% école publique / 20% école privée mis en place sous Chevènement. Or aujourd’hui les suppressions drastiques de postes d’enseignants n’interviennent que dans le public et pas dans le privé. Lorsqu’on évoque la diminution des dépenses publiques on ne parle guère du privé.

Au sein de la devise républicaine, le mot fraternité est actuellement sérieusement mis en cause.

 

                                                         Les combats d’aujourd’hui

 

Jaurès disait : « la république est laïque et sociale. Elle restera laïque, si elle reste sociale » souligne Jean-Paul Delahaye et Patrick Kessel d’ajouter que même dans un monde sans problèmes sociaux, le combat pour la laïcité demeurerait.

Question religieuse-question sociale, le mélange devient détonnant lorsque ces deux entités se confondent.

Cependant la dimension sociale n’explique pas tous les intégrismes. Certains intégristes sont très riches.

Actuellement le Vatican tente de récupérer au niveau européen (et à l’ONU) ce qu’il a perdu au niveau des nations à travers notamment l’article 51 de la constitution européenne. Il vient d’imposer la censure d’un rapport sur le créationnisme (le créationnisme monothéiste moderne combat surtout la théorie de l'évolution).

Il est de bon ton aujourd’hui de se servir des religions pour appliquer la politique que l’on veut imposer. Ceci est dramatique affirme Alain Bondeelle. (Référence au fait d’utiliser la religion pour obtenir la paix sociale par le gouvernement actuel).

Ben Laden est le fils spirituel des USA. L’Islamisme récupère l’énergie du croyant à des fins politiques contre la croisade religieuse entreprise par Bush...


Le danger du « droit à la différence »

Sarkozy veut réformer la constitution et introduire le « droit à la différence » dans son préambule.

En réclamant le droit à la différence, on réclame la différence des droits et c’est ainsi que l’on débouche sur les communautarismes et l’extrême droite. Certains intellectuels de gauche commettent l’erreur de s’engager dans cette voie.

Nous assistons aujourd’hui de plus en plus à des revendications exigeant des droits différents des autres : Parce que je suis Alsacien….Parce que je suis musulman…

Nous sommes libres et égaux en droits, pour nous il est impossible de déroger à cette règle. Mouloud, pratiquant musulman intervient dans le débat pour affirmer sa croyance et son engagement dans la défense de la laïcité.

La revendication de droits particuliers est due aussi au « recul de l’Etat ».

La privatisation à outrance, le repli des communautés sur elles-mêmes favorisent la création des groupes revendicatifs exigeant des droits différents. Et Alain Bondeelle d’ajouter que ces groupes ont le droit d’exister (la liberté d’expression est un droit fondamental) mais ne peuvent avoir de droits particuliers (photo ci-après).




La modification de la loi 1905

Sarkozy a été mis en garde contre la modification de la loi 1905. Le risque est grand de retrouver les querelles et les manifestations à l’échelon national si l’on modifie cette loi.

L’un des points que la commission Bachelon soulève est le financement des associations cultuelles. Les nombreuses églises évangélistes qui se développent poussent en ce sens.

 

La laïcité c’est le combat des femmes

Parmi les nombreuses interventions, signalons particulièrement celle de Jacques Estienne sur le combat des femmes. « La moitié de l’humanité n’a pas les mêmes droits que l’autre moitié »

Patrick Kessel rappelle que tous les combats des femmes au cours de l’histoire ont été gagnés contre l’Eglise. Par exemple encore, lors des dernières élections en Espagne, l’Eglise avait nettement choisi le parti conservateur et demandait de ne pas voter pour Zapatero.

La condition inférieure de la femme est commune dans les religions monothéistes. C’est le patriarcat qui est mis en valeur.

Patrick Kessel termine en affirmant que « le combat de la laïcité, c’est le combat des femmes »

 

Conclusion

 En conclusion Patrick Kessel raconte une anecdote. Il se trouvait un jour en Amérique du Sud auprès de militants progressistes et ceux-ci pour défendre leurs droits chantaient la marseillaise, notre hymne national. C’est, dit-il, parce que notre pays est le pays des droits de l’homme et que notre nation sert encore d’exemple. Nous sommes dans un pays qui sépare pour rassembler autour d’un certain nombre de valeurs.

Notre démocratie vient des profondeurs de notre histoire.

Enfin Patrick Kessel remercie la salle, estimant que le débat avait été « de très haute tenue ».

Thierry Verstraete invite les personnes présentes aux prochains café-cité et Vincent Bawedin se fait l’écho de la satisfaction générale des participants à ce débat.

Une bonne soirée en vérité.

Photos et résumé de Jean-Marie LAOUT

Président d'honneur - LDH Somme 

 

 

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